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Covid-19 : comment les établissements privés se sont mobilisés

le 19/05/2020

Depuis mi-mars, sur les recommandations de l’Agence Régionale de Santé (ARS), plusieurs établissements privés d’Île-de-France sont passés en 2e ligne, juste après les centres hospitaliers. Depuis ce reclassement, les cliniques équipées ont pu directement prendre en charge les patients Covid+, limitant d’autant les pics d’affluence dans les hôpitaux publics.

L’Hôpital privé Jacques Cartier (Massy, Île-de-France) fait partie de ces établissements privés sollicités. Réaménagement des espaces, transfert d’unités fonctionnelles, renfort de personnel et de matériel, mesures de désinfection... tout a été repensé pour une prise en charge optimale des patients.

Une réorganisation expresse

Selon les données des Associations des Réanimateurs du Secteur Privé (ARSP), le pic de prise en charge des patients atteints du Covid-19 s’est situé autour du 26 mars.

Fort heureusement, les établissements de santé avaient déjà pris leurs dispositions, bien en amont. "Nos capacités d’accueil ont été sensiblement augmentées, explique le Professeur Julien Amour, anesthésiste réanimateur en chirurgie cardiaque à l’Hôpital privé Jacques Cartier. Nous avons créé de toutes pièces un nouvel espace de réanimation, une réanimation dites 'hors les murs'". Un aménagement réalisé grâce à la réquisition du service de soins intensifs de cardiologie et à l’installation, en 48h, de 16 nouveaux lits de réanimation.

Des équipes paramédicales et médicales volontaires ont été constituées au pied levé afin d’assurer la continuité de soins dans cette unité de novo. "Cela nous a permis d’affronter le premier pic d’afflux de patients Covid+. Grâce à l’effet du confinement, cette réanimation 'hors les murs' s’est progressivement vidée jusqu’à l’être complètement actuellement, quoi que restant opérationnelle… Ainsi, nous nous préparons à une éventuelle 'deuxième vague' : 10 lits de réanimation hors les murs seront ainsi disponibles en cas de forte affluence dépassant le capacitaire de la réanimation structurelle de l’Hôpital privé Jacques Cartier", précise le Professeur.

Un accueil particulier a également été créé et des zones bien délimitées permettent la circulation sans contact des patients Covid+ et des autres. "Nous avons des filières de soins bien séparées, en imagerie par exemple avec un scanner du niveau -1 exclusivement réservé aux patients Covid- et un scanner au rez-de chaussée dédié aux patients Covid+. Il en va de même avec tous les étages de l’hôpital, chacun étant jusqu’à lors réservé pour des types de patients particuliers", poursuit le spécialiste. C’est ainsi que les pathologies qui nécessitent une hospitalisation sans délai peuvent être traitées, sans risque de contamination. 

La cellule de crise : nouveau pôle décisionnel

Alors que la totalité des activités a été mise entre parenthèses, l’hôpital a aussi dû repenser son organisation interne. "À l’initiative de François Auquiere, Directeur de l’établissement, une cellule de crise composée de dix personnes a été formée. Cela nous permet de prendre des décisions collectives et unanimes rapidement. D’un point de vue organisationnel, médical mais aussi éthique". Rythmologue, interniste, cardiologue, réanimateur, anesthésiste, chirurgien, médecin urgentiste, pharmacien, médecin hygiéniste... les profils sont variés, à l’image des sujets abordés. "Nous devons par exemple statuer sur le déploiement de ressources humaines, la migration de services pour créer de la place supplémentaire, anticiper les pénuries de médicament, arbitrer sur le statut urgent ou pas d’une procédure chirurgicale... Il faut être le plus consensuel possible. Le travail accompli est fantastique et la solidarité est inédite", déclare le Professeur.

Grâce à cette cellule, les équipes ont pu faire face à la crise sans être dépassées. "C’est un outil fondamental de cohésion. Bien coordonnés, nous avons pu statuer sur les cas de patients non Covid et ne procéder qu’aux chirurgies vraiment urgentes, ne pouvant pas attendre les quelques semaines nécessaires au désengorgement de l’offre de soins lié à la pandémie".

Un constat empreint de positivisme, au lendemain d’une vague difficile à affronter. "J’ai rarement été aussi fier d’une équipe. Au plus fort de cette déferlante, nous devions intuber les patients à tour de bras. Nous avons littéralement eu le sentiment que la terre s’était arrêtée de tourner. Mais le professionnalisme de chacun et leur implication ont permis de franchir ces épreuves". Ainsi, et même si la pandémie est loin d’être maîtrisée, les équipes soignantes mesurent déjà toute la portée de leurs efforts.