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Réduire les opioïdes pendant l’anesthésie : retour sur les résultats d’une étude menée au sein du Médipôle Lyon-Villeurbanne.

le 25/06/2025

Réduire les opioïdes pendant l'anesthésie permettrait-il de diminuer le besoin de prendre des antalgiques forts en période post-opératoire ? C'est la question sur laquelle s'est penché le Docteur Vincent Collange, médecin anesthésiste-réanimateur au Médipôle Lyon-Villeurbanne (Ramsay Santé) dans le cadre d'une étude innovante. Une recherche qui pourrait bien bouleverser les pratiques anesthésiques actuelles et offrir de nouvelles perspectives aux patients.

Une approche innovante centrée sur les besoins des patients

Traditionnellement, une anesthésie générale repose sur trois piliers : des produits qui endorment les patients, des médicaments antalgiques (le plus souvent des opioïdes dérivés de la morphine), et des médicaments qui empêchent de bouger. Mais, cette approche classique soulève aujourd'hui des questions importantes. « L'utilisation d'opioïdes pendant l'anesthésie peut créer une forme de dépendance qui augmente le risque que les patients en aient davantage besoin par la suite pour soulager la douleur », explique le Dr Vincent Collange.

Cette réflexion l'a conduit à s'intéresser à une technique d'anesthésie sans opioïdes développée par le Professeur Marc De Kock en Belgique, qu'il a adaptée et mise en pratique depuis plusieurs années. Cette approche repose sur une logique simple : puisque la douleur nécessite d'être conscient pour être ressentie, et qu'un patient anesthésié est inconscient, pourquoi utiliser systématiquement des opioïdes ?

De l'idée clinique à l'étude scientifique

Soutenu par le Groupe Ramsay Santé et en collaboration avec plusieurs confrères du Médipôle Lyon-Villeurbanne, le Dr Collange a transformé son expérience pratique de cette technique en projet de recherche. L'objectif : comparer scientifiquement la technique anesthésique sans opioïdes avec la méthode classique et évaluer ses bénéfices réels pour les patients.

Cette étude randomisée contrôlée a porté sur 160 patients volontaires devant subir une colectomie par laparoscopie (ablation d'une partie du côlon par chirurgie mini-invasive), répartis en deux groupes. Le premier bénéficiait de la technique d'anesthésie classique avec morphine, le second de la technique privilégiée par le Dr Collange, sans opioïdes.

Comment fonctionne l'anesthésie sans opioïdes ?

« Nous remplaçons les opioïdes par d'autres médicaments qui ont des vertus analgésiques, ainsi que par des médicaments qui modulent la réponse de l'organisme, détaille le Dr Collange. Le concept repose sur le fait que sous anesthésie générale, il n'y a pas de ressenti de la douleur. Pour simplifier, les opioïdes agissent plutôt au niveau cérébral pour aider à accepter la douleur, mais si notre système nerveux n'a pas d'interaction avec la douleur pendant l'intervention, nous n'avons pas forcément intérêt à les utiliser. » Cette approche permet de maintenir une anesthésie efficace tout en évitant les effets potentiellement néfastes des opioïdes sur la récupération post-opératoire.

Des résultats encourageants

Les résultats, publiés dans une revue scientifique en octobre 2024, sont prometteurs. « Il n'y a pas de différence significative entre les deux groupes sur le plan de la douleur ressentie, souligne le Dr Collange. Ce qui signifie que la nouvelle technique n'est pas inférieure à la technique de référence ». Plus encore, une tendance à l'amélioration a été constatée dans le groupe sans opioïdes, même si elle n'est pas statistiquement significative du fait du nombre de patient dans l’étude. 

Les bénéfices semblent particulièrement intéressants pour les interventions les plus lourdes nécessitant les anesthésies les plus longues. « Plus l'opération est complexe, plus nous avons intérêt à diminuer les doses d'opioïdes. C'est sur ces populations qu'il y a le plus de bénéfices potentiels », observe le Dr Collange.

Quelles perspectives pour généraliser la réduction des opioïdes pendant l’anesthésie ?

Si les résultats actuels sont encourageants, le Dr Collange reste prudent quant aux prochaines étapes. « Il est difficile de mettre en évidence des différences significatives. Il faudrait beaucoup plus de données pour envisager une phase 2. »

Par ailleurs, la généralisation de cette approche se heurte encore à des résistances culturelles au sein de la profession. « Il existe parfois des réticences liées aux pratiques établies. Certains confrères préfèrent s'en tenir aux protocoles qu'ils maîtrisent parfaitement, reconnaît l’anesthésiste. L'objectif de cette étude est justement d'apporter des données scientifiques pour éclairer ces choix thérapeutiques et ouvrir la voie à des nouvelles pratiques bénéfiques pour les patients. »

Cette recherche illustre parfaitement l'engagement du Groupe Ramsay Santé à soutenir l'innovation médicale au service des patients. En évaluant scientifiquement des techniques prometteuses et en s'appuyant sur une démarche scientifique rigoureuse, le Dr Collange et ses équipes ouvrent la voie à une anesthésie potentiellement plus respectueuse de l'organisme et favorisant une meilleure récupération post-opératoire. Une approche qui, demain, pourrait bien offrir aux patients une alternative intéressante à l'anesthésie traditionnelle.